Qui après nous vivrez, Herve Le Corre

Les touts petits avis de Collectif Polar

Post-it de Flingueuses


Qui après nous vivrez de Herve Le Corre. Paru le 10 janvier 2024 aux Éditions Rivages dans la collection Rivages-Noir. 20€90. (393 p.) ; 22 x 15 cm
4e de couv :

Qui après nous vivrez

Un soir, au milieu du XXIe siècle, tout s’éteint. On croît à une panne ou à une coupure d’électricité comme il s’en produit souvent dans un monde finissant, en proie aux pénuries, aux crises, aux pandémies. Mais cette fois, le courant ne revient pas et le chaos s’installe.

Dans une grande ville de province, une jeune femme, Rebecca, et son compagnon Martin viennent malgré tout de donner naissance à un enfant, la petite Alice. Mais le jour où le réseau électrique s’effondre, le jeune père ne rentre pas chez lui. Pour sa compagne, l’angoisse va grandissant.

Trois générations plus tard, héritières des femmes qui de mère en fille ont affronté le chaos, Nour et sa fille Clara cheminent en compagnie de Marceau et de son garçon Léo. Ils tentent de survivre à la faim, aux intempéries et à la violence, dans un pays dévasté où la sauvagerie le dispute à l’amour, envers et contre tout.

 

 

L’auteur : Hervé Le Corre est né en 1955 à Bordeaux où il a été professeur de lettres. Révélé par la Série Noire, il sera reconnu comme un auteur majeur avec L’Homme aux lèvres de saphir, publié en Rivages/noir et couronné par le Prix Mystère de la critique. Suivra une série de livres remarquables : Les Coeurs déchiquetés (Grand Prix de Littérature policière), Après la guerre (lauréat de six prix, dont le Prix du polar européen du Point), Prendre les loups pour des chiens, Dans l’ombre du brasier, grande fresque sur la Commune de Paris et Traverser la nuit, beaux succès de librairie. Il signe ici un bouleversant roman noir qui est aussi une méditation sur le possible futur d’une humanité au bord du gouffre.
Extraits :
« La forêt morte s’étendait aussi loin que le regard portait.
Les troncs calcinés, couchés les uns sur les autres par les tempêtes, émergeaient d’un fouillis de fougères et d’ajoncs. Des branches noires se dressaient au-dessus de ce chaos comme les ultimes appels au secours de géants brûlés vifs. La lune pâle se couchait dans un ciel indolent où s’effilochaient les nuages »
« Un peu plus loin, seul au milieu de ce qui avait été une clairière, l’arbre surgissait dans le jour naissant, soulevé par la lumière de l’aube. Le garçon s’arrêtait toujours pour le regarder, rassuré par sa force intacte. C’était un chêne immense, plusieurs fois centenaire, dont le feuillage épais, plein de cachettes obscures dans lesquelles il aimait venir s’asseoir, tremblait au vent. Les incendies ne l’avaient même pas frôlé, le contournant, l’encerclant, sans y laisser aucun stigmate. À cent mètres à peine, la forêt n’était qu’une confusion carbonisée, hérissée de moignons que les tempêtes n’avaient pas arrachés. Léo aimait imaginer que l’arbre avait tenu à distance les flammes grâce à une énergie mystérieuse. Les repoussant, tel un guerrier seul face à un assaut barbare. »
« La lueur des écrans leur colle sur la figure un masque blême aux joues creuses, aux yeux brillants, ils ne bougent pas, ils cillent à peine, lui allongé sur un transat, des écouteurs plantés dans les oreilles, elle assise en tailleur sur un fauteuil, caressant du doigt un rectangle bleuté. Il regarde un vieux film policier coréen des années 10, et elle lit un roman du xxe siècle, l’histoire d’un village mythique de Colombie peuplé d’êtres extravagants et gouverné par la magie »

 

 Chronique de Serial Lectrice : Le petit avis de Kris

 

Qui après nous vivrez – Herve Le Corre

A la fin du XXIe siècle, la succession de crises de natures différentes a presque eu raison de l’humanité. 

Dans une grande ville de province, Rebecca doit survivre avec sa fille Alice quand son compagnon Martin ne revient pas

Trois générations plus tard, dans un monde où toute technologie avancée a disparu, un petit groupe de gens a trouvé un abri de fortune dans une maison campagnarde qui a échappé à la destruction. Pas pour longtemps. Des pillards vont bientôt l’incendier et les survivants vont devoir fuir sur les routes avec leur carriole et leur cheval.

Commence une épopée proche du western, où chaque jour l’enjeu est de survivre…

Dans ce roman qui prend aux tripes, on ne peut s’empêcher de penser a « 1984 ».. L’auteur a bien su capturer le lecteur dans ses filets.

Glaçant, émouvant ou violent, on ne peut s’empêcher de penser … « et si » …. Trois générations se succèdent (dans un désordre voulu et qui rend très bien les situations) et chacune porte son lot de peines et de petites joies. Visionnaire ? Souhaitons que non …

Un livre qui laisse des traces.

 

autres extraits :
« Près de cent millions de morts dans le monde à cause de ce virus en deux ans. Bilan officiel communiqué par les gouvernements, qui tous minimisent le nombre de victimes en affichant, chacun de son côté, les bons résultats de leur lutte contre la pandémie. Les ONG estiment qu’on peut multiplier par deux le nombre de décès. Des observations satellite montrent des centaines d’hectares de cimetières improvisés au cœur des forêts tropicales, des convois de camions transportant les corps vers des crématoires géants. On a tendu en travers du Congo, du Gange des filets pour récupérer les milliers de cadavres qu’y ont jetés des familles ou des proches épouvantés, terrassés par le deuil au fin fond de campagnes et de savanes, leurs populations en voie d’anéantissement, loin des hôpitaux et des dispensaires.
Depuis une dizaine d’années le taux de natalité s’est effondré partout, même en Afrique, même en Inde et l’on annonce au cours des dix années à venir une baisse plus rapide encore de la population mondiale. »
« Toute la nuit, dans la lueur tremblante de leurs lampes, ils tiennent entre eux, sur eux le petit corps d’Alice se débattant contre la nuit, se tordant par moments comme une suppliciée et les accablant de son cri, étouffé ou puissant, éraillé ou profond. Ils lui parlent à l’oreille, ils disent toutes les choses douces qu’ils savent, lui racontent des histoires rassurantes pleines d’animaux tranquilles et de forêts magiques et parfois, alors, elle se calme pendant quelques secondes, semble les écouter, fermant les yeux, puis recommence à pleurer, puis sa plainte enfle de nouveau comme s’ils n’avaient pu la convaincre, comme si leurs histoires pour enfants n’étaient déjà plus de son âge. »
« Rebecca ressent une tristesse étrange, furtive, qu’elle congédie en allant s’asseoir aussitôt à son bureau pour travailler. La batterie de l’ordinateur lui annonce cinq heures d’autonomie. Un jaguar l’attend au bord d’un fleuve, dressé, le cou tendu. Il semble la regarder. Zak. Elle a travaillé des semaines sur l’éclat, la profondeur de ce regard. Elle a créé Zak. Elle a inventé la puissance de son corps, la fluidité de ses mouvements. Du premier croquis sur papier jusqu’à sa naissance en 3D. C’est son animal familier. Féroce et si doux. Luttant pour préserver les lambeaux de forêt où les siens et lui ont trouvé refuge, aux côtés de quelques humains, traqués, acculés comme eux.
Elle zoome sur le regard hypnotique du fauve et ouvre les outils qui permettront de faire battre ses paupières, frémir son mufle, frissonner son pelage. »

Lu dans le cadre de 3 défis littéraires :

 

– Challenge Thriller et polar 2023- 2024 chez Sharon 

  le tour du monde en 80 jours chez Bidib (Angleterre)

 Le mois du polar février 2024 chez Sharron

 

17 réflexions sur “Qui après nous vivrez, Herve Le Corre

  1. Le livre à ne pas lire quand on a le moral dans les chaussettes, un peu comme  » chambres noires » de Karine Giebel, sinon on va se pendre. Merci à Kris pour le partage de la chronique 🙏 😘

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