Bienvenue à Gomorrhe de Tom Chatfield

Le livre : Bienvenue à Gomorrhe de Tom Chatfield  – traduction : Valéry Lameignère – Paru le chez Hugo Roman – collection Hugo Thriller – 19.95 € (473 pages) ; format 14 x 21 cm

4ème de couverture :

 » Gomorrhe. Un nom murmuré dans les recoins les plus sombres des forums les plus tordus. Un endroit que la lie du Darknet rêve de visiter. Un mot prononcé sur un ton ironique, quand on plaisante sur ce qu’aucun darknet ne vous vendra jamais. Tout le monde sait comment on se divertissait à Sodome, mais de quelle nature étaient les mœurs de Gomorrhe pour mériter, elle aussi, d’être détruite par « une pluie de souffre et de feu’ ? « .
Infiltrer des néo-nazis occupés à faire de notre planète un endroit infréquentable suffisait largement à remplir la vie d’Azi Bello, et à lui permettre de faire la démonstration de ses talents de hackeur. Mais lorsque la mystérieuse Anna s’invite dans l’abri de jardin qui lui sert de bureau, la vie d’Azi prend une toute autre tournure.
Car Anna et l’organisation secrète pour laquelle elle travaille en savent suffisamment sur Azi pour qu’il n’ait pas d’autre choix que de leur obéir. Et ceux qu’on lui ordonne de mettre hors d’état de nuire sont considérablement plus dangereux que la meute de suprémacistes qu’il combattait derrière ses écrans.
De Londres à Raqqa en passant par Berlin, Athènes, San Francisco et l’Allemagne, pourchassé par des ennemis d’autant plus terrifiants qu’ils sont souvent invisibles, Azi va découvrir que le monde réel est infiniment plus dangereux que le virtuel.
Et que d’un monde à l’autre, Gomorrhe se nourrit avec la même avidité de l’argent des uns et de l’idéologie des autres pour étendre son règne de terreur.

L’auteur : Le Dr Tom Chatfield est un écrivain, diffuseur, philosophe de la technologie et éducateur britannique. Il souhaite améliorer nos expériences et notre compréhension de la technologie numérique.
Les livres non romanesques de Tom explorant la culture numérique – le plus récemment Critical Thinking (SAGE Publishing) et Live This Book! (Pingouin) – sont apparus dans plus de trente langues. Son premier roman, This is Gomorrah (Hodder), a été publié en juillet 2019 et est sélectionné pour le CWA Steel Dagger du meilleur thriller de l’année.
Les sujets sur lesquels il a écrit récemment incluent l’éthique de l’IA, ce que signifie bien penser, la technologie dans le temps profond et la philosophie des fausses nouvelles. Tom Chatfield est considéré comme l’un des penseurs les plus pertinents de nos sociétés numériques et de la révolution digitale, à laquelle il a consacré plusieurs essais, traduits dans une trentaine de pays.

Extraits :
« On est à mille lieues de ces forums sur le Darknet où neuf tueurs à gages sur dix sont soit des agents du FBI soit des maîtres chanteurs, voire les deux. À Gomorrhe, l’ordre et la fiabilité sont garantis, parce que les gens qui se cachent derrière cette place de marché des plus discrètes ont le regard rivé sur chacun de ses utilisateurs, ainsi que la capacité de punir tout manquement aux obligations de la façon la plus radicale qui soit. »
« Vivre hors d’atteinte des pistages électroniques, songe-t-il, est devenu l’un des grands privilèges du vingt et unième siècle. Seuls les plus riches et les plus immoraux (deux classes qui se confondent parfois) ont un accès illimité aux luxes que sont la vie privée, le silence, l’air pur, les bons soins médicaux et le sommeil réparateur. Bien qu’elle n’ait pas grand-chose à offrir en pâture aux fouineurs, même la pauvreté n’est plus un moyen sûr d’échapper à la voracité de ceux qui surveillent nos activités. »

 

La chronique jubilatoire de Dany

Bienvenue à Gomorrhe de Tom Chatfield

Bienvenue chez les hackers 2.0 … ou plutôt 2,5.0 voire 3.0. Bienvenue ? C’est l’avenir qui le dira …

Dans ses remerciements l’auteur précise : « il s’agit d’une œuvre de fiction qui joue délibérément avec la réalité – mélange de plausible et de fantastique, de faits historiques et de choses qui m’ont simplement amusé. Contrairement à la réalité, la fiction a l’obligation d’être crédible. » Oui crédible … pari réussi Monsieur Chatfield, vous m’avez vraiment fait flipper …

Gomorrhe est une excroissance du Darknet, dès lors on s’attend à tout trouver dans ce supermarché de l’horreur en ligne. S’y côtoient le plus glauque de l’humanité virtuelle et les hackers redresseurs de torts, justiciers de notre monde digital. Ainsi le héros, AZI attire notre sympathie car il affiche la vertu au point de créer de fausses identités capables de rallier les plus infames idéologies comme le néo-nazisme, afin de mieux les combattre. Bien sûr les hackers les plus doués sont sous surveillance des divers services secrets de la planète, le temps de leur utilité. Loin du cliché du geek boutonneux et obèse, AZI vit en ermite dans la cabane au fond de son jardin et va dévier de ses principes quand il va être contacté par une « amie » qui l’appelle à l’aide, pour déjouer un complot djihadiste. Tout ne se passera pas au mieux et va provoquer une fuite en avant, vers Berlin, Athènes puis San Francisco où il pourra trouver des alliés ou des ennemis.

Une histoire complexe, très documentée, au vocabulaire parfois hermétique où je me suis perdue malgré les notes en fin de chapitre. Mais peu importe, je suis passée outre ces embûches pour suivre ce thriller rapide et haletant de presque 500 pages. J’ai aimé cette vision de l’Athènes souterraine et libertaire, loin des cartes postales et l’apothéose finale digne d’une superproduction hollywoodienne.

Ce thriller technologique mâtiné d’espionnage, son héros vertueux certes mais immergé dans un roman sans concession et néanmoins bien sanglant, nous feront par ailleurs découvrir les mécanismes d’endoctrinement au djihad en œuvre à Raqqa, dans la chronique d’une évasion avortée.

Lu en version numérique 9.99 €

Je remercie les éditions Hugo Thriller pour m’avoir permis de faire cette découverte dépaysante et riche d’enseignements.

 

Autres extraits
«  Enfin, il se rase entièrement les cheveux.
Dans les films, cette dernière opération bénéficie invariablement d’un montage photogénique, au cours duquel le spectateur voit des touffes étonnamment soyeuses recouvrir le sol au son d’une musique syncopée. Dans ce qu’il est convenu d’appeler la vraie vie – en tout cas la vie bien trop réelle dans laquelle Azi se débat en ce moment –, il s’avère que la manœuvre ressemble davantage au débroussaillement d’un bouquet de ronces à l’aide d’un couteau à beurre. Il pousse des jurons, se fait une coupure au doigt et s’arrache le cuir chevelu tandis qu’avec une lenteur épuisante des touffes pleines de nœuds quittent son crâne sous l’action cisaillante du rasoir électrique. »
« Lorsqu’Azi était encore adolescent, à une époque où le partage de code source passait par le recopiage ligne par ligne d’un document imprimé, la rue Stournari avait déjà une réputation suffisante auprès des hackeurs pour figurer dans les magazines qu’il dévorait alors, et c’est en partie ce souvenir de jeunesse qui l’a mené jusqu’à Athènes. En ces temps pas si reculés de l’ère pré-web, pendant que les bars d’Exárcheia grouillaient de marxistes tenant le genre de propos que les marxistes tiennent au comptoir depuis au moins 1917, les technophiles avertis convergeaient vers la rue Stournari pour revendre des logiciels achetés dans le commerce, puis crackés par leurs soins. Des hackeurs locaux distribuaient leur carte de visite, puis retrouvaient un employeur potentiel à l’étage d’une boutique informatique, vantant leurs prouesses illégales autour d’un café dans l’espoir qu’elles leur ouvriraient le chemin d’une carrière légale. À cette époque, tous les chapeaux étaient gris pâle. Le côté sombre de la créativité informatique n’avait pas encore étendu son ombre sur l’ensemble de la planète. »

 

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