L’homme sans sommeil, Antonio Lanzetta

Le livre : L’homme sans sommeil : thriller de Antonio Lanzetta ; traduit de l’italien par Anna Durand. Paru le 14 février 2024 chez Mera Editions . 19€90.  (383 p.) ; illustrations en noir et blanc, cartes ; 21 x 13 cm

4e de couv : 

Deux jeunes garçons sortis d’un orphelinat

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, Bruno, treize ans, est soumis au harcèlement constant de ses camarades dans un orphelinat près de Salerne. Seule son amitié avec Nino, le petit nouveau qui prend sa défense, parvient à rendre son séjour supportable.

Un vieux manoir à l’atmosphère oppressante

L’été apporte un vent de liberté et Bruno et Nino sont choisis pour travailler chez les Aloïa, une riche famille des environs. C’est là que Bruno rencontre Caterina, une étrange petite fille qui vit au dernier étage du manoir et qui lui fait découvrir les recoins de l’imposante bâtisse. Mais le jeu prend vite une tournure sinistre : Bruno commence à être tourmenté par d’inexplicables cauchemars, qui le laissent exténué à son réveil.

Un secret enfoui, prêt à ressurgir du passé

La mise au jour, dans la propriété, de plusieurs cadavres en état de décomposition avancée jette un voile inquiétant sur le manoir et ses habitants. À qui appartiennent ces corps ? Et pourquoi tous semblent savoir quelque chose que personne ne veut révéler ?

L’auteur : Écrivain, musicien, chroniqueur littéraire, influencé par ses lectures de Mark Twain, Joe Lansdale, Stephen King et Jo Nesbø, surnommé le « Stephen King italien ». Antonio Lanzetta est né en 1981 et il fait partie du renouveau qui s’amorce dans la littérature de son pays. Lanzetta alterne les points de vue et les époques avec beaucoup de rythme et un sens affûté de l’intrigue pour mieux semer le doute au cœur d’une Italie rurale, profonde, tour à tour cuite par le soleil et détrempée par la pluie, l’Italie du Sud, où il a grandi et vit aujourd’hui.

 

Extraits :
 » Il plongea ses doigts dans la terre, arrachant des mottes en s’efforçant de se relever, en vain, comme si un poids l’empêchait de bouger. Il regarda alors autour de lui : les ombres rampaient et se tordaient telles des créatures émergeant d’un abîme. »     
 « Le vieux moine détourna son regard enfiévré de l’ouvrage pour le porter sur le visage blafard, creusé par une épaisse barbe blanche, du père Agostino.
— Les hommes du Nord sont venus le brûler ! Vous devez partir, maintenant ! »
« Il ferma vivement les paupières, et lorsqu’il les rouvrit, la chose était toujours là. À ses côtés, il y en avait d’autres, aux formes variées, aux corps dans lesquels quelque chose d’animal, d’effrayant, était emprisonné. 
Des statues.
Bruno éclata de rire.
Ce n’étaient que des statues. »     
 « Le père Mario attrapa une ceinture qu’il gardait accrochée au mur. Du cuir dur et des clous, couverts de croûtes de sang séché. Il la fit glisser dans sa main avec un bruissement. Bruno déglutit et retint ses larmes, se sentant mourir.
— C’est la voie du Christ, commenta le prêtre.
Ce dernier poussa un gémissement de satisfaction lorsque la ceinture frappa le dos de l’enfant pour la première fois. Bruno ne hurla pas tout de suite. La douleur, la vraie, vint après la brûlure, après la sensation de chair en feu. La deuxième salve s’abattit sur le dos balafré du nouveau, qui réagit de la même manière. Il encaissa le coup sans broncher et tituba, les genoux frottant contre le sel, les dents enfoncées dans ses lèvres.
Bruno le vit expirer par les narines à la manière d’un taureau, une veine palpitant sur sa tempe. Puis il se retourna et lui adressa un clin d’œil. »

Chronique de Flingueuse : Les lectures de Miss Aline

L’homme sans sommeil, Antonio Lanzetta

l’après lecture :

Bruno, devenu un vieux monsieur, veille sur le sommeil de sa petite fille. Que craint-il ? Qui craint-il ?

Faut-il remonter dans son enfance pour comprendre ? Une enfance de souffrance en orphelinat. L’été il est envoyé travailler dans la demeure des Aloia. Dans la maison du maître une ombre plane.

Quand il ne cauchemarde pas, Bruno passe ses nuits à parler à Caterina. Étrange fillette fantomatique.

Des cadavres dans les bois du château. Le corps d’un enfant dans une maison abandonnée. La mort rôde.

Le style et l’écriture de l’auteur sont addictifs. Il me tient … par les méninges et par le cœur. L’auteur nous livre un très bon thriller légèrement saupoudré de fantastique. Chaque personnage est travaillé avec soin et profondeur. Je m’attache vite à Bruno mais un peu plus sur la réserve en ce qui concerne Nino. Ce dernier sera d’ailleurs vite percé à jour.

L’intrigue est parfaitement maîtrisée et quelle imagination presque machiavélique. Soyez à l’écoute de chaque personnage. Personne ne fait de la figuration. Tous ont leur importance.

Bien que j’ai beaucoup apprécié cette lecture immersive, je déplore une fin un peu rapide.

Merci aux Editions Mera et à Net Galley pour cette découverte livresque.

Bonne lecture.

 

Autres extraits :
« L’homme au chapeau était toujours là, mais son sourire avait disparu.
Un bourdonnement électrique lui donna tout à coup la chair de poule. L’air sembla vibrer, et le silence qui enveloppait le quartier devint pesant.
Bruno inspira profondément, déposa l’oiseau sur le rebord de la fenêtre et retourna s’asseoir. Il resta assis, les os demandant grâce, la main serrée autour de celle de la fillette, la Mort se frayant un chemin dans sa tête.
Demain, se dit-il, demain sera un jour meilleur.
Il ferma les yeux et attendit que l’aube baigne la ville de sa lumière écarlate. »
 » Il se sentait en sécurité sous le lit, dans cet espace étroit et poussiéreux. C’était comme s’allonger dans un cercueil, et refermer le couvercle pour se retrouver dans l’obscurité. Le bruit sourd des battements de son cœur tambourinait contre ses tympans et il guettait le manque d’oxygène.
Il connaissait bien ce sentiment pour l’avoir éprouvé, l’été précédent, lorsque le père Mario l’avait envoyé, avec deux autres garçons, travailler aux pompes funèbres. « La guerre est finie, avait dit le prêtre, tout le monde doit aider à la reconstruction, vous y compris. » Bruno s’en était moqué, il avait aimé cet endroit. Le parfum des fleurs, le marbre froid, un silence comme il n’y en avait pas à l’orphelinat. Là-bas, personne ne l’avait insulté ni battu. Il n’avait eu qu’à s’appliquer à polir des cercueils toute la journée. »
« Le garçon qui l’avait défendu l’attendait dans une pièce minuscule, torse nu, agenouillé sur une bande de gros sel, face au mur. Bruno frissonna : c’était la phase initiale de la pénitence, juste avant la nuit d’enfermement dans la cave, et cela faisait mal, plus que tout le reste.
Le prêtre l’empoigna par la nuque et le poussa en avant, le forçant à s’agenouiller.
— Déshabille-toi, ordonna-t-il.
Bruno s’exécuta lentement. Ses mains tremblaient et il ne parvenait pas à déboutonner sa chemise. Le père Mario n’était pas pressé, et il se contenta d’attendre. Il détaillait ses côtes, les poils de ses bras, chaque fibre de son corps. Jusqu’à ausculter son âme. »

Lu dans le cadre de 2 défis littéraires :

– Challenge Thriller et polar 2023- 2024 chez Sharon 

  le tour du monde en 80 jours chez Bidib (Italie)

16 réflexions sur “L’homme sans sommeil, Antonio Lanzetta

  1. Oh ça me tente beaucoup malgré le bémol de la fin trop rapide (je suis comme miss Aline, j’aime qu’on peaufine les fins !)…. je le note tout de suite ! Merci pour la chronique 🙂

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