Le loup des Cordeliers, Henri Loevenbruck

Le livre : Le loup des Cordeliers,  d’Henri Lœvenbruck. réédité en poche le 8 octobre 2020 chez Pocket. 8€70. (610p) ; 18 x 11 cm

4ème de couverture :

Mai 1789, un vent de révolte souffle sur Paris.

Gabriel Joly, jeune provincial ambitieux, monte à la capitale où il rêve de devenir le plus grand journaliste de son temps. un enquêteur déterminé à faire la lumière sur les mystères de cette période tourmentée.

Son premier défi : démasquer le Loup des Cordeliers, cet étrange justicier qui tient un loup en laisse et, la nuit, commet de sanglants assassinats pour protéger des femmes dans les rues de Paris…

Les investigations de Gabriel Joly le conduisent alors sur la route des grands acteurs de la Révolution qui commence : Danton, Desmoulins, Mirabeau, Robespierre, personnages dont on découvre l’ambition, le caractère, les plans secrets.

Alors que, le 14 juillet, un homme s’échappe discrètement de la Bastille, Gabriel Joly va-t-il découvrir l’identité véritable du Loup des Cordeliers, et mettre au jour l’un des plus grands complots de la Révolution française ?

 

L’auteur :  Henri Lœvenbruck est né en 1972 à Paris, écrivain, parolier et scénariste. Auteur de thrillers et de romans d’aventures, il est traduit dans plus de quinze langues.
Après le bac, hésitant entre la musique et la littérature, il tente d’allier ses deux passions : la semaine, il étudie en khâgne au lycée Chaptal et le week-end il se défoule en concert ou en studio avec de nombreux musiciens. Après avoir étudié la littérature américaine et anglaise à la Sorbonne, l’heure du service national venue, il fait une objection de conscience et passe 17 mois comme maquettiste aux Éditions Francophones d’Amnesty International, il épouse d’ailleurs une Anglaise, puis il part vivre en Angleterre, près de Canterbury, où il enseigne le français dans un collège.
De retour en France, il exerce divers métiers, de barman à web-designer en passant par professeur d’anglais, avant de se diriger vers le journalisme littéraire. Après quelques pas dans le journalisme et la musique (il chantait et jouait de l’orgue Hammond dans divers groupes de rock parisiens), au milieu des années 90, il fonde Science-Fiction Magazine avec Alain Névant, un ami d’enfance.
Après être resté rédacteur-en-chef de ce titre de 1996 à 2000, il publie son premier roman en 1998 aux éditions Baleine, sous le pseudonyme de Philippe Machine. Il décide ensuite de se consacrer pleinement à l’écriture.
Il publie alors deux trilogies de Fantasy, La Moïra (2001-2002) et Gallica (2004), lesquelles rencontrent un succès inédit pour un auteur français (La Moïra dépasse en France les 300 000 exemplaires, toutes éditions confondues, et les droits sont vendus dans 11 pays).
Suivront de nombreux thrillers aux éditions Flammarion (Le Syndrome Copernic, 2007, Le Rasoir d’Ockham, 2008…) qui lui vaudront d’être qualifié par le Nouvel Observateur de « nouveau maître du thriller français ».
Auteur-compositeur-interprète, il écrit des chansons pour lui-même et pour d’autres artistes français. De 2013 à 2015, il rejoint le groupe de rock Freelers.
Membre fondateur du collectif d’artistes La Ligue de l’Imaginaire, en juillet 2011, il est nommé Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres.
En 2015, son roman Nous rêvions juste de Liberté, salué par la critique, est en cours d’adaptation pour le cinéma. En 2018 il publie J’irai tuer pour vous, inspiré de la vie d’un personnage bien réel.
Extraits :
« — Quand ces privilèges ne sont plus que des abus, il faut y renoncer ! rétorqua le ministre des Finances. Ce dont la France manque aujourd’hui, c’est de pain. Et sans pain, le royaume mourra. Or, ce ne sont ni les prières ni les épées qui font le pain, Monsieur. C’est le blé ! Et ce blé, c’est le tiers état qui le fait pousser ! »
 
« — Je veux faire un journalisme d’un genre nouveau, monsieur.
— Ah oui ? Et c’est quoi, un « journalisme d’un genre nouveau » ? s’amusa le libraire.
— Eh bien, j’appellerais ça… le journalisme d’enquête !
— Dame ! Qu’est-ce que c’est que cette faribole, nom d’un tonnerre ?
— J’entends me dispenser de l’éloge comme du blâme, pour chercher l’unique vérité, la livrer au plus grand nombre, même quand elle dérange, car j’ai pour conviction que la vérité seule peut libérer les hommes. Au nom de la liberté de la presse – que j’appelle pourtant de mes vœux – on voit se multiplier les calomnies, les fausses nouvelles, qui sont répétées à l’envi aux quatre coins de la capitale, et ce qui devrait être un outil de lumière, ce qui devrait permettre aux lecteurs de s’éclairer risque de devenir une arme terrible de propagande et d’obscurantisme. Si la presse veut être libre, au sens noble du terme, elle doit s’armer d’une éthique et d’une méthodologie. »

 

La chronique jubilatoire de Dany

 Le loup des Cordeliers, Henri Loevenbruck

Pour les chroniqueurs, Henri Loevenbruck est le remède absolu contre l’angoisse de la page blanche …

Lorsque le lecteur ferme ce roman, immanquablement il se demande ce qui est le plus important dans ses 560 pages. L’histoire captivante de la chute de l’ancien régime, même si l’on connaît la fin, la prise de conscience du pouvoir du peuple sur les nantis, la devise républicaine qui découle de ces deux événements et les parallèles incontournables que nous faisons avec notre actualité qui la rendent bien fragile cette devise ou encore et surtout le tableau de la société de l’époque révolutionnaire. Nous connaissions la rigueur de l’auteur quand il écrit l’Histoire (cf la bibliographie en fin d’ouvrage), ici ce « travers » que l’on ne peut que louer est poussé à son paroxysme, le souci du détail devient un art. Il nous invite à la promenade dans le cloître des Cordeliers avec Danton, Desmoulins, personnages à part entière de l’intrigue … on a envie de s’immerger aux côtés de Gabriel, qui comme le personnage de Balzac Lucien de Rubempré, monte à la capitale pour vivre de son art et de la gloire qu’il pourrait en tirer. Nous faisons notre « initiation maçonnique » et nous chassons les méchants. Qui sont-ils ces méchants ? Des justiciers ou des voyous ? Méchants pour qui ? Jusqu’où doit aller la justice et qui peut la rendre ? Quelle légitimité à la violence ?
Qu’a donc écrit Henri Loevenbruck ? Une fiction historique, une enquête sur un meurtrier en série, une chronique historique sur cet été 1789 et la vie parisienne de cette époque, une romance ? Ce roman est tout à la fois, rompant brutalement avec ses dernières productions, outre cette intrigue complexe et ambigüe, il restera le vocabulaire de l’époque, ces dialogues et ces descriptions d’un autre temps et cependant remarquablement maîtrisés.

Il est bien attachant ce jeune Gabriel, le personnage central de ce roman, aspirant journaliste arrivant à Paris juste au moment de la convocation des Etats Généraux. Et surtout, il est bourré de talent, d’un talent brut et sans concession comme les grands héros romantiques. Son personnage, véritable fil rouge inspiré, a cependant de la chance dans son approche des milieux révolutionnaires, car il rencontre les bonnes personnes au bon moment, notre panthéon révolutionnaire, pour notre plus grand plaisir.

C’est donc avec beaucoup de plaisir que j’ai accompagné Gabriel dans sa chasse au loup des Cordeliers, que j’ai fait la connaissance de Théroigne de Méricourt, admiratrice d’Olympe de Gouges, véritable amazone féministe, ne manquant pas de « googliser » pour l’iconographie disponible qui oui, confirme les descriptions de l’auteur. Un roman qui restera parmi mes coups de cœur de cette année.

Lu en version numérique.

Autres extraits
« La guerre civile n’est pas le plus grand de tous les maux. C’en est un beaucoup plus fâcheux, de réduire le peuple à un tel excès de misère qu’il ne lui reste plus ni courage ni force pour rien entreprendre. Chaque jour, je vois des milliers de malheureux, sans travail, sans salaire, le visage amaigri par le jeûne, les vêtements en lambeaux, se presser devant les portes des boulangers et y attendre, dans une impatience terrible, quelques miettes de pain noir pour nourrir leurs enfants ! Aux barrières de Paris, ce n’est pas le grain qui entre, ce sont les affamés ! »
 
« Ce matin-là, Paris offrit aux députés qui y entrèrent un spectacle tout à fait extraordinaire. Les rues étaient noires de leurs habitants comme des patrouilles de la nouvelle milice citoyenne. Les Parisiens avaient reconstruit eux-mêmes les barrières des fermiers généraux, pour se prémunir la nuit contre les bandes de brigands. S’attendant à un possible retour des troupes royales, ils avaient aussi monté de nombreuses barricades sur les faubourgs, certaines gardées par des canons. La ville semblait installée dans la fragile trêve d’une guerre civile. »
 
« C’est le café qui a détruit nos cabarets ! La tristesse a envahi nos estaminets quand on en a fait des « cafés ». Le café, c’est le vide absolu ! Adieu, la belle humeur d’antan, celle du vin généreux dont nos pères s’enivraient ! Chez moi, madame, vous ne trouverez que vin, de Bourgogne ou de Champagne, cidre de Normandie, liqueur ou eau-de-vie. »
 
« Plus petit que la Salpêtrière ou que Bicêtre, cet hôpital, dirigé par des moines, recevait à peine plus d’une centaine de pensionnaires. Les conditions de vie y étaient moins dures que dans les institutions parisiennes, mais les soins délivrés aux insensés n’y étaient pas vraiment meilleurs : ils se résumaient à des prières, des saignées, des purgatifs et des lavements, selon qu’ils avaient été classés comme frénétiques, sauvages, imbéciles, ivrognes, crapuleux, maniaques ou mélancoliques. Dans les cas les plus extrêmes, on soumettait les patients à des commotions électriques, produites par une bouteille de Leyde, un condensateur qui générait de puissantes étincelles. Aux frénétiques les plus retors, on administrait de grandes saignées, d’abord sur le pied, puis sur l’artère temporale et enfin la jugulaire, en les faisant toujours copieuses, car les médecins affirmaient qu’on ne pouvait guérir ce mal que par des hémorragies abondantes. Aux mélancoliques on rasait la tête et on y appliquait un bonnet d’Hippocrate, un bandage trempé dans un mélange d’eau et de vinaigre froid… Quant à la seule boisson à laquelle les pensionnaires avaient droit, il s’agissait d’une décoction d’orge édulcorée avec de la réglisse et acidulée avec de la crème de tartre. On la disait très efficace. »
 

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