Helena de Jérémy Fel

LA DOUBLE CHRONIQUE

Aujourd’hui les jumelles Flingueuses vous propose chacune leur avis sur un même bouquin

Ce soir c’est Maud qui nous parlera de sa lecture

Ce matin c’est Ophélie qui nous soumet son Off de Oph

Allez c’est parti !


Le livre: Helena de Jérémy Fel. Paru le 22 août 2018 chez Rivages. 23 euros; 733 pages; 20,5 x 2,7 x 14 cm.

 

4ème de couverture:
Kansas, un été plus chaud qu’à l’ordinaire. Une décapotable rouge fonce sur l’Interstate. Du sang coule dans un abattoir désaffecté. Une présence terrifiante sort de l’ombre. Des adolescents veulent changer de vie. Des hurlements s’échappent d’une cave. Des rêves de gloire naissent, d’autres se brisent. La jeune Hayley se prépare pour un tournoi de golf en hommage à sa mère trop tôt disparue. Norma, seule avec ses trois enfants dans une maison perdue au milieu des champs, essaie tant bien que mal de maintenir l’équilibre familial. Quant à Tommy, dix-sept ans, il ne parvient à atténuer sa propre souffrance qu’en l’infligeant à d’autres… Tous trois se retrouvent piégés, chacun à sa manière, dans un engrenage infernal d’où ils tenteront par tous les moyens de s’extirper. Quitte à risquer le pire. Et il y a Helena… Jusqu’où une mère peut-elle aller pour protéger ses enfants lorsqu’ils commettent l’irréparable ? Après Les Loups à leur porte, Jeremy Fel aborde cette vertigineuse question dans une grande fresque virtuose aux allures de thriller psychologique.

L’auteur: Jérémy Fel fut libraire pendant quelques temps, spécialisé dans les littératures de l’imaginaire, avant de décider de se consacrer à l’écriture. C’est après ses études de lettres et de philosophie au Havre, puis quelques scénarios de courts métrages, qu’il s’est orienté vers l’écriture de nouvelles.Les loups à leur porte (2015), son premier roman, est un grand puzzle feuilletonesque à l’atmosphère énigmatique et troublante.
En 2018, il publie Helena« , un des titres phares de la rentrée littéraire chez Rivages.
Extrait:
« C’était un enfant apeuré qu’elle avait trouvé devant la cabane, pas un criminel, pas celui que les autres, tous les autres, montreraient du doigt quand il serait livré à la justice. Personne ne le connaissait comme elle, personne ne savait ce par quoi il était passé. Personne d’autre qu’elle ne pourrait le comprendre. Et, à présent, il était seul dans cette nuit noire. Peut-être n’oserait-il même plus revenir. Il était si vulnérable. Elle avait tant besoin de le serrer à nouveau dans ses bras, de lui promettre qu’elle le protégerait envers et contre tout, comme toute mère sensée se devait de le faire. »

 

Le OFF de OPH

Chronique d’un roman Kinghitchcockien !

C’est assommée que je suis sortie de cette lecture dont j’ai lu les 732 pages l’angoisse rivée au ventre. Parce qu’« Helena » c’est d’abord une ambiance. Pas un rythme endiablé, pas un page-turner au sens où le suspens prévaut et les cliffangers se suivent, mais bien une atmosphère. Une atmosphère que je n’avais connue que par King ou Hitchcok. Une atmosphère qui malgré la peur, l’angoisse qu’elle dégage est difficile à quitter quand il faut refermer le livre pour assurer le boulot, les enfants et chéri.
« Allongé sur le matelas, il fuma une cigarette en repensant au rêve qu’il avait fait la nuit dernière […] Il était prostré contre le mur de la cuisine, pendant que de l’extérieur l’ogre faisait crisser ses griffes sur la fenêtre, ses yeux devenus fous, aux reflets de l’arc-en-ciel. Tout en résistant à ses tentatives de l’inviter à entrer, Tommy avait reconnu la voix de sa mère, laquelle se tenait près de l’évier, ses mains plongées dans l’eau froide. Mais sa voix avait paru si lointaine, comme si elle ne provenait pas de sa bouche. Quand il s’était levé pour la rejoindre, il s’était rendu compte que la porte donnant sur le jardin était grande ouverte, et que le monstre avait déjà fait un pas à l’intérieur. »
Les lieux choisis par Jérémy Fel pour y placer son intrigue renforcent aussi le climat particulier qui se dégage du roman : le Kansas, une maison perdue au milieu des champs de maïs, la présence quasi constante des corbeaux, des épouvantails… Mais aussi les nombreux passages en italique qui mêlent à la réalité les cauchemars, les pensées des protagonistes.
J’ai donc, vous l’avez compris, particulièrement accroché à l’écriture de Jérémy Fel et à ce thriller psychologique dans lequel, ambiance, lieux, personnages, contribuent à maintenir une tension narrative jusqu’à la dernière ligne du livre.
Les personnages que nous suivons : Tommy, Norma, Hayley et… Helena m’ont intriguée, bouleversée. Je les ai aimés, je les ai détestés, j’ai souffert avec eux, mais pour chacun d’entre eux, même dans leur noirceur j’ai ressenti de l’empathie. Je ne vous dirai pas pourquoi, je vous laisse vivre pleinement cette expérience.
L’auteur a glissé dans son histoire de nombreuses références littéraires mais aussi cinématographiques, la plus évidente étant « le magicien d’Oz » qui est en fil rouge tout au long de l’histoire. Mais je dois dire qu’une d’entre elles m’a fait sourire puisque ce film d’animation, que je regardais petite, dégage le même type d’atmosphère que ce roman : « Brisby et le secret de Nimh ».
Jérémy m’a également poussé à réfléchir sur des thèmes tels que la construction de l’enfant en tant qu’adulte en devenir. Nos vécus et éventuels traumatismes qui impactent nos vies d’adultes. Il évoque aussi la question des choix : faisons-nous toujours les bons ? Qu’aurions-nous changé si nous avions pu revenir en arrière ?
Enfin outre ces aspects, « Helena » est le seul roman lu sur lequel, à aucun moment, je n’ai pu anticiper quoi que ce soit. Rien ne se passe comme je l’avais imaginé, l’auteur m’a, à chaque fois, surprise et prise à contre pied, pour m’emmener vers un final complètement inattendu qui en définitive m’a apporté plus de questions que de réponses.
« Helena » a été, pour ma part, une réelle expérience littéraire, et j’ai une affection particulière pour ce roman qui m’aura surprise de la première ligne, jusqu’au point final.

Et vous, que diriez vous d’aller à la rencontre de ces personnages dissemblables qui, par leurs choix, mêleront leurs destins ?

5 réflexions sur “Helena de Jérémy Fel

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